INSULAIRE (Almost all alone)
The first exhibition organised under the banner of « Avant-Propos », which sounds like a preface to the first chapter of a gallery to come, brings together previously unseen works by Olivier Kosta-Théfaine. Having settled on the Île d’Yeu , an Island in Vendée, the artist, originally from Sartrouville in the Paris suburbs, has been exploring his new territory, scrutinising it to get to know it better. During one of his island walks, he came across a piece of graffiti on the wall of a former canning factory: a clumsy ‘Bando*’, probably executed by a local. To see graffiti stamped in this way on his island was unexpected and strange, to say the least. The idea of integrating a natural element of the island and linking it to such an urban icon appealed to him.
A mollusc closely related to squid, cuttlefish is also known as morgate, which means « sea hare » in Breton. Morgate is fished with an artificial lure, the jig, which has a hook at the end. Since his arrival on the island, Olivier Kosta-Théfaine has enjoyed this family fishing activity, which allows him to kill time in a place where there is very little to do. From the cuttlefish he catches, he extracts the very black ink that he will use, after placing it in a spray can**, to create a series of paintings. The artist uses a natural element from the Île d’Yeu – cuttlefish ink – which he links to the world of graffiti by concentrating it in a spray can. The paintings in natural cuttlefish ink are set against ceilings burnt with a beetle flame. This urban, suburban practice, echoes the housing estates on the Île d’Yeu and the Etang de Thau in Sète, where the artist was recently invited. A housing estate with a name full of promise: Île de Thau, built on the pond itself, an artificial island linked by two bridges, an island-city in the middle of nowhere like Île d’Yeu, where the artist experiences the same sensations as when he lived in the Paris suburbs. The island has many similarities with where he comes from.
The paintings and burnt ceilings are embellished with beer cans found on the Île d’Yeu and decorated with shells that cover almost the whole of these mini-monticules of aluminium. Olivier Kosta-Théfaine likes to use the insignificant, the ordinary that we haven’t seen for a long time, the better to displace it. The bare surface reveals the other side of the coin. This chrome exterior, smooth and identifiable, is a reminder that the solitude and boredom of the island – nothing happens here – encourages idleness. So, to make reality less dull, and because it’s hard to escape from an island, we drink up the time. « Almost all alone » refers to the solitude of an island confinement where permission to walk three hundred metres led to the beach. And even though the beach was off-limits, you could still see the horizon. But a low, obscured horizon. Black sky, black sea.
« Almost all alone » was also the beginning of an adventure for Jean-Guillaume Panis, as he embarked on his project for a new gallery, the one foreshadowed by « Avant-Propos », a small, generous space, a new island.
Words by Guillaume Lasserre
*Bando is the graffiti name of Philippe Lehman, the man who brought graffiti to Europe, doing his first tags in Paris in the early 80s after his initiation in New York.
**The Preval sprayer kit transforms any liquid into aerosol paint: a lower glass section for the liquid to be sprayed is attached to the upper metal section containing the gas and the nozzle.
INSULAIRE (Almost seul tout)
La première exposition organisée sous le sceau d’« Avant-Propos », qui résonne comme une préface au premier chapitre d’une galerie à venir, réunit des pièces inédites d’Olivier Kosta-Théfaine. Installé sur l’Île d’Yeu, en Vendée, l’artiste, originaire de Sartrouville en banlieue parisienne, arpente son nouveau territoire, le scrute pour mieux le connaître. Il découvre, au cours de l’une de ses promenades insulaires, un graffiti sur le mur d’une ancienne conserverie : un « Bando* » maladroit, probablement exécuté par un local. Observer un graffiti estampillé de la sorte sur son île est pour le moins inattendu, étrange. L’idée d’intégrer un élément naturel de l’île et de le relier à une telle icône urbaine, l’interpelle.
Mollusque proche du calamar, la seiche est aussi appelée morgate, qui signifie « lièvre de mer » en breton. La pêche à la morgate se pratique avec un leurre artificiel, la turlutte, pourvue à son extrémité d’un grappin d’hameçons. Depuis son arrivée sur l’île, Olivier Kosta-Théfaine aime à pratiquer cette pêche familiale qui permet de tuer le temps dans un endroit où il y a bien peu à faire. Des seiches pêchées, il en tire l’encre très noire dont il va se servir, après l’avoir placée dans une bombe en spray**, pour réaliser une série de peintures. L’artiste utilise un élément naturel de l’Île d’Yeu – l’encre de seiche – qu’il relie au monde du graffiti en le concentrant dans une bombe aérosol. Les peintures à l’encre naturelle de seiche sont mises en vis-à-vis de plafonds brûlés à la flamme d’un biquet. Une pratique urbaine, de banlieue, qui fait écho aux cités HLM de l’Île d’Yeu et de l’étang de Thau à Sète, ville où l’artiste était récemment invité. Une cité avec un nom plein de promesses : Île de Thau, construite sur l’étang même, une île artificielle reliée par deux ponts, une île-cité au milieu de nulle part comme l’Île d’Yeu où l’artiste éprouve les mêmes sensations que lorsqu’il vivait en banlieue parisienne. L’île présente beaucoup d’analogies avec l’endroit d’où il vient.
Les peintures et les plafonds brûlés sont agrémentés de cannettes de bières trouvées sur l’Île d’Yeu et décorées de coquillages qui recouvrent presque la totalité de ces mini-monticules d’aluminium. Olivier Kosta-Théfaine aime à utiliser l’insignifiant, l’ordinaire que l’on ne voit plus depuis longtemps, pour mieux le déplacer. La surface laissée nue révèle l’envers du décor. Cet extérieur chromé, lisse et identifiable rappelle que la solitude et l’ennui insulaires – il ne se passe rien ici – favorisent l’oisiveté. Alors, pour rendre la réalité moins terne, et parce que d’une île, il est difficile de s’échapper, on boit le temps. « Almost seul tout », presque tout seul, renvoie à la solitude d’un confinement insulaire au cours duquel l’autorisation de parcourir trois cents mètres conduisait jusqu’à la plage. Et même si la plage était interdite, on pouvait contempler l’horizon. Mais un horizon bas, obscurci. Ciel noir, mer noire.
« Almost seul tout », presque tout seul, c’est aussi le début d’une aventure pour Jean-Guillaume Panis, au moment de se lancer dans son projet de nouvelle galerie, celle que préfigure « Avant-Propos », un petit espace si généreux, une île nouvelle.
Texte de Guillaume Lasserre
* Bando est le nom de graffeur de Philippe Lehman, l’homme qui a amené le graffiti en Europe, faisant ses premiers tags à Paris au début des années 80 après son initiation à New York.
**Le sprayer kit Preval permet de transformer n’importe quel liquide en peinture aérosol : une partie basse en verre pour le liquide à pulvériser se fixe sur la partie haute en métal pourvue du gaz et de la buse.